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Traiter l’hypertension artérielle permet-il d’améliorer la santé cérébrale ?

Sihem Boultif Journaliste santé en collaboration avec Docteur Christophe de Jaeger (Longévité et gériatrie)

Selon une étude, présentée par des chercheurs lors de l’American Stroke Conference, qui se tiendra à Dallas du 8 au 10 février prochain, certains traitements contre l’hypertension artérielle permettraient d’améliorer la santé cérébrale. Les explications du Docteur Christophe de Jaeger, médecin physiologiste et membre du comité d’experts de Doctissimo.

Sommaire

  1. Hypertension : traitement standard vs traitement intensif
  2. Une étude portant sur l’observation des espaces péri vasculaires
  3. Miser sur un traitement intensif de l’hypertension artérielle
  4. Quel est l’objectif de tension artérielle idéal ?
  5. Comment bien mesurer sa tension artérielle ?

D’après les chercheurs, traiter l’hypertension serait un moyen d’améliorer certaines lésions du cerveau, observées à l’IRM.

Hypertension : traitement standard vs traitement intensif

Les scientifiques se sont basés sur l’analyse d’IRM de 658 volontaires, suivis pour ce travail pendant 4 ans, en moyenne. Ces participants, dont l’âge moyen est de 67 ans, sont à 60 % des femmes, n’ayant pas d’antécédent de diabète, de démence ou d’AVC. En revanche, tous les participants souffraient d’hypertension artérielle.

Les scientifiques les ont divisés en deux groupes :

  • Un groupe de 243 personnes, qui a reçu un traitement intensif pour l’hypertension artérielle avec un objectif de pression systolique de 120 mm Hg.
  • Un autre groupe de 199 personnes avec un traitement standard et un objectif de 140 mm Hg.

Une étude portant sur l’observation des espaces péri vasculaires

Les scientifiques se sont intéressés aux espaces péri vasculaires des cerveaux des participants. « Les espaces périvasculaires sont des espaces remplis de liquide céphalo-rachidien, également appelés espaces de Virchow-Robin, situés dans la couche la plus interne du cerveau » explique le Dr Sandra Narayanan, neurologue vasculaire et chirurgienne neuro-interventionnelle au Pacific Stroke & Neurovascular Center. au Pacific Neuroscience Institute en Californie. « Ils peuvent grossir avec le vieillissement, l’inflammation, les troubles démyélinisants ou les processus neurodégénératifs. Ils aident à éliminer l’eau et les déchets métaboliques du cerveau« .

Au début de l’étude, le volume des espaces périvasculaires était similaire dans les deux groupes. Cependant, après presque quatre ans de traitement de l’hypertension artérielle, le volume des zones périvasculaires a diminué de manière significative dans le groupe de traitement intensif. Il n’a pas changé dans le groupe de traitement standard.

Miser sur un traitement intensif de l’hypertension artérielle

D’après les conclusions des chercheurs, le traitement intensif de l’hypertension artérielle était plus efficace pour améliorer ou inverser les dommages dans les régions périvasculaires du cerveau qu’un traitement plus modéré.

Les résultats de cette étude suggèrent donc que les zones périvasculaires sont dynamiques et qu’il pourrait être possible de les réduire avec une baisse intensive de la pression artérielle. « Cela pourrait être associé à une meilleure élimination des toxines dans le cerveau et à une meilleure santé cérébrale et contribuer à inverser les effets de l’hypertension artérielle sur l’espace périvasculaire » ont rapporté les chercheurs. « Le côté positif de cette étude correspond à ce que l’on observe en clinique : à savoir que les lésions et les troubles peuvent régresser sous traitement » indique le Docteur Christophe de Jaeger.

Quel est l’objectif de tension artérielle idéal ?

D’après cette étude, donc, la surveillance et la gestion de la pression artérielle sont essentielles pour un cerveau en bonne santé.

Mais quelle est l’objectif à maintenir dans le temps, en ce qui concerne la pression artérielle ? « Pour moi, les chiffres d’une pression artérielle idéale sont de 120/70 mmHg » définit tout d’abord le Docteur Christophe de Jaeger, médecin physiologiste et membre du comité d’experts de Doctissimo. « Mais c’est une mesure difficile à établir, car la tension artérielle varie selon de nombreux paramètres. L’évaluation réelle de la charge tensionnelle est donc une véritable problématique, pour nous médecins. Elle peut être un problème majeure pour la santé, surtout si elle est associée à d’autres facteurs de risque, comme le tabac ou le cholestérol ».

Comment bien mesurer sa tension artérielle ?

Pour avoir une bonne idée de sa tension artérielle, il faut avoir un bon appareil de mesure fiable, et réaliser des mesures tout au long de la journée pendant plusieurs jours. « Il faut un appareil avec un brassard qui se porte au bras pour la mesure. Et réaliser la première mesure au lit, c’est à dire avoir l’appareil à portée de main sur le chevet. Puis refaire différentes mesures dans la journée, avant et après le repas de midi, vers 17h et le soir, avant de se coucher » conseille le médecin.

« Et il est important de noter le chiffre de la tension systolique, de la diastolique, la fréquence cardiaque et son ressenti : fatigué, énervé, en bonne forme… ». L’appareil devra également être contrôlé une fois par an au cabinet du médecin traitant, afin de vérifier si les prises de tension sont justes. « Ensuite, sur discussion médicale, un Holter pourra être porté sur 24h, pour des mesures pendant ce laps de temps, ou encore l’instauration d’un traitement » conclut Christophe de Jaeger.

Le Docteur Christophe de Jaeger est médecin et son travail est centré sur la physiologie de la sénescence depuis plus de 30 ans.

Il a développé en particulier la notion d’âge physiologique (différent de l’âge chronologique et

de l’âge ressenti) et sa prise en charge afin d’optimiser le capital santé de chacun et de lui conserver le plus longtemps possible ses capacités physiologiques. En d’autres termes, rester en bonne santé le plus longtemps possible.

De formation initiale gérontologue, il a rapidement complété son cursus à la faculté des sciences en biologie de la sénescence. Il enseigne à la faculté de médecine de Paris et de Lille et également à la faculté des sciences dans le Master de biologie du vieillissement. Il a écrit ou coécrit de nombreux livres dont une dizaine grand public, ainsi que de nombreux articles scientifiques.

Son dernier ouvrage grand public  »Médecine de la Longévité : Une révolution ! » est publié en octobre 2023 chez Guy Trédaniel éditeur.

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