27 03 2023 - Régime 1

Enfin, un médicament pour rester mince malgré un régime trop riche ?

Publié le 23/03/2023

Magali Régnier Journaliste

en collaboration avec Docteur Christophe de Jaeger (Longévité et gériatrie)

Des chercheurs ont mis au point une nouvelle molécule capable de prévenir la prise de poids et les dommages du foie chez des souris soumises à un régime gras et sucré. Les rongeurs sont même devenues plus minces qu’avant ! Sommes nous à l’aube d’un médicament miracle ?

Sommaire

  1. Limiter le magnésium accélère le métabolisme
  2. La molécule désamorce les méfaits d’une alimentation trop riche
  3. « Une révolution en termes de nutrition »

Manger ce qu’on veut, sans répercussion sur le poids ni sur la santé, vous en rêviez ? la science va peut rendre cela possible ! Des chercheurs du Centre des sciences de la santé de l’Université du Texas à San Antonio ont ainsi mis au point un médicament qui empêche la prise de poids et les modifications hépatiques indésirables chez des souris, nourries avec un régime occidental (c’est à dire riche en sucre et en graisses) tout au long de leur vie.

Limiter le magnésium accélère le métabolisme

L’équipe de recherche a découvert le médicament alors qu’ils exploraient l’impact du magnésium sur le métabolisme, qui agirait donc sur la production et la consommation d’énergie dans les cellules. Cette énergie, appelée ATP, alimente les processus du corps et joue de nombreux rôles clés dans la santé, notamment dans la régulation de la glycémie, de la pression artérielle et la construction des os. Mais les chercheurs ont découvert qu’une trop grande quantité de magnésium ralentissait également la production d’énergie dans les mitochondries, qui sont les centrales électriques des cellules.

Ils ont alors eu l’idée de supprimer MRS2 sur les souris testées, un gène qui favorise le transport du magnésium dans les mitochondries. L’action a entraîné un métabolisme plus efficace du sucre et des graisses dans les centrales électriques et un résultat étonnant : les souris se sont retrouvées plus minces qu’avant et en bonne santé. Le foie et les tissus adipeux (gras) des rongeurs n’ont montré aucun signe de stéatose hépatique, une complication liée à une mauvaise alimentation, à l’obésité et au diabète de type 2.

La molécule désamorce les méfaits d’une alimentation trop riche

Le médicament, que les chercheurs appellent CPACC, accomplit la même chose. Il limite la quantité de transfert de magnésium dans les centrales électriques. Les chercheurs ont pu le vérifier à nouveau sur des rongeurs : le résultat était le même, les souris se sont retrouvées sveltes et en bonne santé alors qu’une alimentation trop riche et sucrée se répercute bien souvent par plusieurs pathologies, dont l’obésité, le diabète de type 2 et les complications cardiovasculaires.

« Un médicament qui peut réduire le risque de maladies cardiométaboliques telles que les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux, et également réduire l’incidence du cancer du foie lié à la stéatose hépatique, aura un impact énorme. Nous poursuivrons son développement” concluent les chercheurs. UT Health San Antonio a déposé une demande de brevet sur le médicament.

« Une révolution en termes de nutrition »

Pour le Docteur Christophe De Jaeger, physiologiste et membre du comité d’experts Doctissimo, l’annonce a l’effet d’une petite bombe : “C’est la drogue miracle par excellence” projette-t-il, avant de préciser le côté sensationnel de l’étude :

“Pendant longtemps, en clinique humaine, nous nous sommes concentrés sur le déficit de magnésium qui causait fatigue, stress, crampes, etc. Mais là, on est en train de nous dire dans cette étude réalisée sur des souris, que si on inhibe un gène qui favorise l’entrée du magnésium dans les mitochondries, on a un métabolisme des sucres et de la graisse qui est plus efficace. Et qu’en plus, les souris “trop” nourries ne développent pas de maladie, d’hépatite ou d’obésité. C’est très intéressant !”.

L’expert n’en est pas moins lucide sur les étapes qu’il faudrait encore pour voir un tel médicament fonctionner chez l’homme :

“L’important est de faire une étude chez l’être humain, pour voir si on retrouve ce genre de chose, car ce ne serait pas la première fois qu’une molécule fonctionne chez la souris, et pas chez l’homme. Mais c’est une piste d’étude extraordinaire. On voit là quelque chose de nouveau qui pourrait aider beaucoup de gens. On est peut être à l’aube d’une véritable révolution en termes de nutrition.

Sources

  • Madaris TR, Venkatesan M, Maity S, Stein MC, Vishnu N, Venkateswaran MK, Davis JG, Ramachandran K, Uthayabalan S, Allen C, Osidele A, Stanley K, Bigham NP, Bakewell TM, Narkunan M, Le A, Karanam V, Li K, Mhapankar A, Norton L, Ross J, Aslam MI, Reeves WB, Singh BB, Caplan J, Wilson JJ, Stathopulos PB, Baur JA, Madesh M. Limiting Mrs2-dependent mitochondrial Mg2+ uptake induces metabolic programming in prolonged dietary stress. Cell Rep. 2023 Feb 27;42(3):112155. doi: 10.1016/j.celrep.2023.112155. Epub ahead of print. PMID: 36857182.

Le Docteur Christophe de Jaeger est médecin et son travail est centré sur la physiologie de la sénescence depuis plus de 30 ans.

Il a développé en particulier la notion d’âge physiologique (différent de l’âge chronologique et

de l’âge ressenti) et sa prise en charge afin d’optimiser le capital santé de chacun et de lui conserver le plus longtemps possible ses capacités physiologiques. En d’autres termes, rester en bonne santé le plus longtemps possible.

De formation initiale gérontologue, il a rapidement complété son cursus à la faculté des sciences en biologie de la sénescence. Il enseigne à la faculté de médecine de Paris et de Lille et également à la faculté des sciences dans le Master de biologie du vieillissement. Il a écrit ou coécrit de nombreux livres dont une dizaine grand public, ainsi que de nombreux articles scientifiques.

Son dernier ouvrage grand public  »Médecine de la Longévité : Une révolution ! » est publié en octobre 2023 chez Guy Trédaniel éditeur.

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